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Mention des jours de RTT sur les bulletins de salaire insuffisante à prouver leur prise effective

 

Lorsqu’un salarié attrait un employeur devant la justice pour réclamer le paiement de certaines sommes, il appartient à l’employeur, même si ces sommes sont mentionnées sur le bulletin de paie remis au salarié, d’apporter la démonstration du paiement de celles-ci.

 

Dans une affaire jugée le 10 janvier 2024, la Cour de Cassation a eu l’occasion de rappeler une nouvelle fois que la charge de la preuve de la prise effective par le salarié des jours de RTT (JRTT) qu’il a acquis appartient à l’employeur et que le bulletin de paie ne peut constituer un élément de preuve de cette prise (Cass. soc., 10 janvier 2024, n°22-17.917).

 

On rappellera que l’octroi de ces jours de réduction du temps de travail est généralement prévu par un accord d’aménagement du temps de travail, d’entreprise ou de branche, et est destiné à compenser les heures que le salarié aura effectuées au-delà de la durée hebdomadaire légale (ou conventionnelle si cette dernière est inférieure à la durée légale).

 

Au visa des règles applicables en la matière, à savoir l'article 1315 du code civil, suivant lequel celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit le prouver et, réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation, et l'article L 3243-3 du code du travail, qui édicte que « l'acceptation sans protestation ni réserve d'un bulletin de paie par le travailleur ne peut valoir de sa part renonciation au paiement de tout ou partie du salaire et des indemnités ou accessoires de salaire qui lui sont dus en application de la loi, du règlement, d'une convention ou d'un accord collectif de travail ou d'un contrat », « cette acceptation ne [pouvant] valoir non plus compte arrêté et réglé au sens de l'article 1269 du code de procédure civile », la Haute Cour a fermement posé le principe suivant : « la mention sur les bulletins de paie des jours pris au titre de la réduction du temps de travail n'a qu'une valeur informative, la charge de la preuve de leur octroi effectif incombant, en cas de contestation, à l'employeur ».

 

Exit donc la démonstration de la prise effective des jours de RTT par la seule production des bulletins de paie les mentionnant. A l’employeur de fournir la preuve de ce que le salarié a effectivement bénéficié de ces jours. Le moyen selon lequel le salarié n’a émis aucune réserve ou réclamation lorsque lui ont été remis ses bulletins de paie s’avère inopérant.

 

La Cour de Cassation a déjà eu à statuer par le passé sur la valeur probante du bulletin de salaire dont la production aux débats est destinée à apporter la démonstration de ce que le salarié est bien rempli de ses droits quant au paiement des sommes qui y sont mentionnées.

Selon les juges, c’est à l’employeur d’apporter la preuve de ce qu’il a bien procédé au versement du salaire entre les mains du salarié, ce dernier ne pouvant pas être considéré comme ayant été rempli de ses droits parce qu’il aurait accepté, sans protester ni émettre de réserves, le bulletin de paie qui lui aurait été remis.

 

On ne saurait en conséquence trop recommander une particulière vigilance aux employeurs quant à la prise effective des JRTT par les salariés et aux moyens à mettre en œuvre, destinés à faire la démonstration, en cas de litige, de celle-ci.

 

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